Bernardo Kucinski

K. est un roman assez court mais très fort. L'auteur nous invite dans la machine à disparaître mise en place par le régime brésilien et plonge le lecteur dans l'angoisse et l'incompréhension des proches des victimes, proches dont les questions restent sans réponse. Les autorités les baladent de fausses pistes en faux espoirs sans jamais reconnaître avoir enlevé personne. L'expression qui revient régulièrement "on les a disparus" symbolise tout à fait l'impuissance des proches à même simplement identifier les auteurs de ces disparitions. On ne sait rien, personne ne parle et même en 2017 il reste des zones d'ombre.

L'autre atout de ce roman est l'alternance des points de vues qui permet au lecteur de davantage saisir toute l'inhumanité du système. En effet, le lecteur a accès à quelques bribes d'informations au travers des yeux des tortionnaires, des informateurs, des activistes clandestins ... mais toutes ces informations qu'il obtient ne sont que des pièces d'un puzzle qu'il n'arrive pas à reconstruire, pièces qui de plus manquent aux proches dans la mesure où elles ne sont inventées que pour le lecteur.

En clair, ce roman met parfaitement en scène un appareil étatique qui broie ses victimes sans en laisser une seul trace et qui par là, broie aussi leur famille qui restant dans l'incertitude ne peuvent entamer leur deuil. Sachant que l'histoire s'inspire de faits réels, cela est d'autant plus touchant et révoltant. Enfin, c'est une plongée édifiante et instructive dans la dictature militaire du Brésil des années 60.