Anne-Marie Thiesse
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Note moyenne : 7.67/10Nombre d'évaluations : 3
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La création des identités nationales : Europe XVIII°-XX° siècle
La définition d'une nationalité comportait au XIX° siècle
• L'existence de mythes communs, de légendes et de contes assurant la continuité avec les grands ancêtres d'antan. On sélectionne ainsi des pères fondateurs comme on le fit avec l'Iliade et de l'Odyssée. Il est de peu d'importance que l'authenticité des pièces de littératures historiques produites soient douteuses
• Une définition, purification et l'imposition d'une langue commune nationale. Elle doit assurer la communication horizontale et verticale au sein de la nation. Le choix de cette langue ne fut pas toujours obvie: on balançait entre rupture radicale d'avec le passé et adoption de la langue métissée de la majorité du peuple. Les dialectes ne furent donc pas exclus mais ils furent réduits à la portion congrue au titre de monuments historiques.
• Un folklore. Les coutumes paysannes sont jugées comme dignes d'intérêts simplement parce qu'elles sont les vestiges de la culture ancestrale.
• Des monuments conservés, restaurés ou imités
Le processus est le suivant: le peuple fusionne dans la Nation identifiée comme ci-dessus, il s'identifie à un territoire où l'état met en place des moyens de direction, de régulation et de défense. Pour résumer le résultat, on utilise le vocable de patrie
Dans la première partie, l'auteur nous narre l'histoire de la constitution des nationalités en explicitant des exemples comme celui de la Norvège, de la Roumanie, de la Bulgarie, de la Grèce. Puis vient l'étude de la constitution de la nationalité tchèque, hongroise, finlandaise, estonienne. La création artificielle de nationalité comme en Belgique ou même la tentative sa destruction comme en Pologne lui soutirent également quelques pages.
Dans le processus de maturation de ladite nationalité, les artistes et intellectuels sont fortement sollicités. Il est en effet urgentissime de pouvoir rapidement s'appuyer sur une littérature en langue nationale, de roman historique. Mais les reconstructions donnèrent parfois lieu à des aberrations comme la thèse que la France d'avant 1789 était constituée de deux peuples: les gaulois engendrant la plèbe du tiers-état et les francs étant à l'origine de la noblesse. En outre les historiens mis à contributions pour identifiés héros et événements formateurs embellirent voire travestirent parfois la réalité: l'écrasement des sarrasins à Poitiers en 732 n'est que pure invention, Charles Martel ne défit que des wisigoths aquitains rétifs aux pouvoir des francs. La peinture et la musique glorifient les héros et les événements historiques y sont glorifiés. En architecture, soit des ruines sont restaurées soit des châteaux sont construits à l'identique dans un style de jadis. Les musées présentent maintenant au peuple des symboles de nationalité jadis réservés à la noblesse. L'artisanat est encouragé parfois même créé de toute pièce; le sport est encensé comme révélateur de la santé physique de la nation; le tourisme doit permettre au peuple d'apprécier l'histoire et les paysages de son territoire; le cinéma permet de revivre des événements historiques.
On peut changer de langue, de culture mais on ne peut pas changer de sang, telle était l'affirmation de la nationalité de jadis. Ce lemme est repris par les nationalistes d'aujourd'hui afin de bloquer toute intégration. L'auteur fait œuvre d'historienne mais je reste frustré car j'espérais un peu de sociologie projective. Il me semble que ce qui a été un ensemble de critères pour définir une nationalité jadis ne l'est plus. L'auteur aborde le sujet des nationalités des états-nations mais effleure à peine le principe d'une nationalité européenne et n'envisage pas la manière de modifier la base de définition au regard d'une population multiculturelle. Pourtant les USA ont réussi ce défi mais ce au prix d'un certain nombre de conflits externes.
C'est une lecture malgré tout édifiante et à conseiller à ceux qui parle d'identité nationale et de sa protection. On y démontre les mécanismes d'une telle création.
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Biographie
Anne-Marie Thiesse, ancienne élève de l’ENS, directrice de recherche au CNRS, est spécialiste d’histoire culturelle. Elle a publié notamment Le Roman du Quotidien, lecteurs et lectures populaires à la Belle Epoque (rééd. Seuil, coll. « Points », 2000), Ils apprenaient la France, l’exaltation des régions dans le discours patriotiques (Éditions Maison des Sciences de l’Homme), La Création des Identités nationales – Europe xviiie-xxe siècle (rééd. Seuil, coll. « Pointshistoire », 2001.)
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