Créatures, Tome 1 : Les Deux Princes d'Ombrelumière

Amatu fit mine de s’en aller.

« Vous qui galvaudez vos talents au plus offrant, n’y a-t-il que noirceur dans les recueils de votre âme ? » cria Ikana.

Le scientifique se retourna :

« Au contraire ! Je me bats au nom de tous ces gens que ton père a choisi d’écarter du royaume. Nous autres, Technomages, n’avons plus été considérés comme des Godons à part entière depuis si longtemps… Toi qui as beaucoup voyagé, tu devrais savoir mieux que quiconque que la divergence est un terreau propice à l’exclusion !

— Rien n’est plus faux ! Partout, les gens aspirent à quelque chose de plus fort qu’eux ! Un horizon un peu plus éloigné que de survivre jusqu’au lendemain ! »

L’inventeur retentit d’un rire froid et cynique.

« Hahaha ! Comme quoi ? L’amour ?

— Oui !

— Ça n’est pas aussi simple par les temps qui courent. Spoiler(cliquez pour révéler)Mais, dis-moi… tu aimes toujours ton frère après tout le mal qu’il t’a fait ?

— Bien sûr ! Fort heureusement !

— Vraiment ? Je me demande qui est le plus fou d’entre vous deux !

— Vous doutez qu’aimer soit encore possible ? Quelle déception… Est-ce là votre indépassable jalon ?

— Défendre des valeurs et de beaux principes n’est pas chose aisée, je l’avoue… ça invite au courage. Pour autant, inutile de se voiler la face ! Je ne vois sincèrement pas pourquoi ni comment je pourrais m’enticher d’un tel despote. Spoiler(cliquez pour révéler)L’être que tu chérissais le plus au monde, en dehors de tes proches parents, a disparu. Akam est mort, happé par la folie d’un abîme draconique. Tu le sais, tu l’as vu… ton frère s’est noyé dans les ténèbres d’un puits sans fond !

— Quand vous vous abaissez à le servir !

— Pfff ! Je vois que notre discussion tourne au vinaigre ! Je vais y couper court ! Adieu ô roi Ikana, j’aurais souhaité mieux te connaître ! »

Avant qu’Amatu ne s’en aille, le souverain le rattrapa.

« Attendez ! Vous étiez présent lorsque tout a basculé ? »

Le scientifique haussa les épaules.

« Disons que j’ai observé sa chute, de loin, sous un angle relativement modéré. »

Tout à coup, Ikana eut une révélation :

« Vous l’avez abandonné ! Il appelait à l’aide et vous l’avez laissé à son sort comme si vous vous débarrassiez de vos immondices ! vociféra-t-il.

— Ce n’était pas simple… »

Ikana, le regard embué, éructa de rage :

« Votre conduite est monstrueuse ! Lâche ! Vous n’êtes qu’un vulgaire poltron empli de terreur et d’arrogance ! Sac à merde !

Spoiler(cliquez pour révéler)— Tais-toi jeune avorton ! Au Tsalbard, j’ai assisté à des événements dont tu n’as même pas idée. Personne ne soupçonne ce qui se trame dans cette maudite province, personne… et personne, par ailleurs, n’a envie de le savoir ! J’ai essayé de l’en empêcher. Mais, l’agent draconique disposait déjà de pouvoirs cauchemardesques. Il était trop tard pour que j’intervienne.

Spoiler(cliquez pour révéler)— Vous avez choisi le camp du mal, par couardise !

— Oui, j’ai peur, je tiens à ce que tu le saches ! Crois-tu que l’œuvre de ce damné se soit arrêtée là ? J’ai eu des échos : cela se perpétue et c’est de pire en pire. Alors, pourquoi prétendre ? Ikana, ta perception d’Ombrelumière est erronée. J’ai choisi le camp de ceux qui survivent. L’amour n’existe pas - du moins, l’amour n’existe pas au-delà de celui qu’une mère porte à ses propres enfants. Après tout ce que j’ai pu voir au Tsalbard, je n’ai aucun doute là-dessus ! Adieu Ikana. Que les dieux de la création te protègent, car nous serons désormais ennemis ! »