Xavier Otzi
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Note moyenne : 8.5/10Nombre d'évaluations : 4
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'L'Homme Maigre' relate la rencontre de deux êtres totalement différents : un hybride, fossoyeur de profession, et un taxidermiste, obsédé par la réalisation de sa plus grande Oeuvre.
Le premier est touchant par sa quête d'humanité qui ne le fait pas même s'interroger sur sa nature particulière, alors que le second, au travers de sa routine perfectionniste, cherche la reconnaissance, pour sortir de l'ombre de la figure de son père. Une amitié atypique vont les mener tantôt à quelques confessions, tantôt à des scènes assez fantasques Spoiler(cliquez pour révéler)(je pense par exemple au cadeau que souhaite faire Djool à Konrad alors qu'il se trouve dans la morgue).
De l'animal qui veut être homme, il y a l'homme trop civilisé...
Ces deux personnages sont parfaitement maîtrisés, chaque scène, chaque détail est savamment orchestré de façon à ce que le lecteur les côtoie de près, en même temps qu'il leur découvre sans cesse de nouvelles facettes.
De premier abord classique sur le plan de la "créature" confrontée aux hommes, notamment par leur violence, par leur hypocrisie (on pense au personnage de Frankenstein dont Xavier Otzi adresse un clin d'oeil direct dans son roman), l'histoire se teinte d'une touche de fantastique et de thriller.
Djool, qui n'est pas tout à fait humain, va par le biais de sa recontre avec Konrad ressentir la nécessité de quitter la vie qu'il mène actuellement. Dès le départ on sait que Konrad cherche à se servir de Djool car lui ce qu'il l'intéresse avant tout, c'est de trouver de la peau humaine pour réaliser son Oeuvre. Spoiler(cliquez pour révéler)Alors que cet improbable duo s'essaye à la cohabitation, Konrad se retrouve en parallèle confronté à l'insistance de son frère aîné, Toni, un policier, qui s'inquiète de la disparition de leur paternel...
...la maîtrise des personnages m'a impressionnée ! Entre Djool qui s'improvise ami fidèle (tandis que petit à petit la colère va monter) et Konrad, le perfectionniste, qui peine de plus en plus à masquer son impatience face à la réalisation de ses chimères. Tous les éléments sont là, disséminés dans les pages ; comme les pièces d'un puzzle : tout est lié.
La création est au coeur de la vie et des pensées de Konrad : au-delà de ses dessins d'enfant, de ses voyages et de la cryptozoologie, il veut recréer des créatures originelles, qui se révèlent ses chimères personnelles. Ces êtres sont hybrides, d'où son désir de trouver un cadavre pour en récupérer la peau.
Du perfectionnisme à la manie, il n'y a qu'un pas.
Pour sa démarche, le taxidermiste a créé une nouvelle discipline : la cryptoanthropozoologie. C'est alors qu'il cherchait un cimetière isolé qu'il fait la rencontre de Djool. Il pense manipuler celui-ci pour qu'il l'aide dans son entreprise d'exhumation puis de vol, cependant que la relation amicale qu'il s'efforce de faire paraître va pousser le fossoyeur à se confier... Spoiler(cliquez pour révéler)Lorsqu'il est témoin de sa véritable nature, Konrad l'étudie en cachette ; mais cela ne lui révèle pas grand chose.
Spoiler(cliquez pour révéler)Evidemment, entre l'obsession du taxidermiste pour ses chimères hybrides et sa pièce secrète où il expose ses grandes oeuvres, l'on se doute bien que la présence de Djool chez lui va précipiter les choses. Entre leur lamentable tentative de repérage pour subtiliser un cadavre, le fait de cacher le fossoyeur, et le frère de Konrad qui ne cesse de revenir à la charge concernant la disparition et autres affaires de leur père, la patience du taxidermiste perfectionniste s'effrite au fil des pages. Et Djool remarque ses sottes d'humeur, lui qui ne cesse d'apprendre et de découvrir des hommes, il ne va être que davantage sensible au comportement de son ami. Mais même alors qu'il se sent blessé, qu'il sent la colère monter, il va rester, s'enlisant davantage dans de maladroits faux pas en cherchant à prouver son amitié envers le taxidermiste.
Le démiurge de chimères.
L'homme est animal. L'animal est homme...
"(...) qui veut faire l'ange fait la bête" écrivit Blaise Pascal.
Voilà toute la complexité de l'être humain : résidus archaïques / animalité, dénaturation / humanimalité. Konrad possède cette forme d'arrogance de se placer au-dessus des autres par le biais de la création de sa grande Oeuvre. Spoiler(cliquez pour révéler)Obsession, manie et plus le poussent à explorer sous un angle de savant fou son projet qui dépasse l'Art. Au début, sa volonté peut paraître louable...elle devient discutable dès lors que l'on se rend compte de la façon dont il met la main sur son matériau d'exception (la peau humaine). Imaginez un taxidermiste travaillant seul et en cachette sur le compte d'une étrange fièvre... Car il ne s'agit pas là d'une thèse illustrée à renfort de croquis et de sources cryptozoologiques, ethnologiques ou encore zoologiques, mais de la réalisation d'une obsession, au travers d'une démarche éthique discutable...
La passion de Konrad fascine autant qu'elle dérange. De même que sa relation avec Djool rend mal à l'aise, sentiment renforcé par l'alternance des points de vue des personnages. Le décor et les ambiances sont criants de réalisme : le cimetière où vit et travaille Djool, le cabinet de travail de Konrad, puis sa pièce d'exposition Spoiler(cliquez pour révéler)dont on finira par franchir le seuil, en passant par le magasin de musique où le fossoyeur, guitariste de blues, se rend de temps en temps, ou encore le cabanon où le taxidermiste prépare ses dépouilles... : tension et répulsion côtoient solitude et espoir, passion maniaque et atmosphère de cabinet de curiosités.
L'instinct animal de survie, par la création maladive ou la volonté d'être libre. Tel est à mes yeux le fil rouge sous-jacent de 'L'Homme Maigre'.
Xavier Otzi interroge ici sur l'homme et l'animal, ce qui construit ceux-ci. Konrad les associe tandis que Djool semble en être une possible illustration. En ce qui concerne le taxidermiste, tout commence dès son enfance, par ses rêves et ses dessins, puis ses relations familliales. Le côté imaginaire et artistique se transforme en caractère perfectionniste pour finalement révéler une passion/obsession véritablement maniaque.
En parallèle, Djool s'attache à générer de l'humanité en lui : il joue du blues, tente de se familiariser avec la cuisine. Cet homme hybride est tout simplement heureux de trouver un ami en la personne de Konrad ! Vulnérable et naïf, Spoiler(cliquez pour révéler)un instinct plus animal apparaîtra, au fur et à mesure qu'il s'indignera des comportements de rejet et de violence à son égard.
De l'animal ou de l'homme.
Jusqu'où peuvent mener les obsessions ?
Je ne parlerais pas ici du dénouement, mis à part qu'il m'a surprise ! (eh oui, je me suis fait avoir alors que, comme je le disais plus haut, toutes les pièces du puzzle étaient là !)
Afficher en entierIl est clairement déroutant et je vous conseille d'être préparé pour le lire. Si vous êtes sensible, il ne vous plaira peut-être pas. Parce qu'il est violent, et que dans cette violence, il est beau. Vous voyez le truc, ses défauts sont ses qualités, si bien qu'il ne plaira pas à tout le monde. J'ai le souvenir d'une intrigue très sympathique à suivre même si elle met du temps à s'installer. J'avais des difficultés à voir où l'auteur nous transportait, toutefois, une fois piégé par l'intrigue, tout devient fascinant, génial et prenant. Il y a de chouettes rebondissements et un final, qui sérieusement, m'a renversée. Les thèmes abordés comme la mort, la taxidermie, ce qui touche aux cimetières et à la profanation de tombes, de corps sont intenses, pas facile, mais ils sont hautement passionnants. Le tout ancré dans un univers contemporain flirtant entre thriller et fantastique.
Afficher en entierBon livre, histoire prenante et assez étrange ; ça patine juste un peu vers le milieu, on tourne en rond dans les rapports entre les deux personnages mais heureusement la fin est touchante et sauve l'intrigue. J'ai bien aimé ce roman.
Afficher en entierJ'ai dévoré ce livre en un après-midi ce printemps, à l'hôpital,
Âmes sensibles s'abstenir,
Le "héros" de ce livre, Djool, est surprenant,
Les lieux où se passent l'histoire me sont connus, étant lyonnais,
J'ai eu la chance de rencontrer Xavier, l'auteur, aux Aventuriales à Ménétrol (63) le week-end dernier, et de bien discuter, malgré les masques de rigueur.
Bref, c'est un petit roman sympa et touchant, bien que surprenant, que je conseille.
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